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Dieumerci Mbokani est persuadé que «son» Congo peut aller très loin en Coupe d’Afrique. L’Anderlechtois rêve plus d’un sacre là-bas que du soulier d’or d’ici.
Quatre jours après avoir disputé «une des plus belles rencontres de sa carrière» contre le Ghana pour son baptême du feu en Coupe d’Afrique, Dieumerci Mbokani (27 ans) affrontera le Niger demain soir. Mais avant ce deuxième rendez-vous avec l’histoire du football congolais, l’attaquant anderlechtois sera plus que probablement chaussé d’or ce soir. Entretien avec le meilleur joueur du championnat, très attachant lorsqu’on prend la peine de percer le mystère.
Dieumerci, on ne voit pas qui pourrait vous empêcher de chausser votre premier Soulier d’or, ce mercredi soir…
Il y a beaucoup de très bons joueurs en Belgique. Je ne suis pas le seul à avoir marqué des points. Bacca a fait de très bonnes choses, Vossen aussi, sans parler de Silvio (Proto) même si un gardien a moins de chances de gagner. Mais c’est vrai que, sur l’ensemble des deux tours, je pense mériter ce Soulier d’or. Je le méritais déjà quand j’étais au Standard. Trop déçu, je m’étais juré de ne plus me présenter à la cérémonie et j’ai souvent déclaré que je me foutais complètement de ce trophée. J’ai changé d’avis. Si je n’avais pas été retenu par la Coupe d’Afrique, j’y serais venu avec plaisir.
Vous semblez n’avoir jamais été aussi fort qu’actuellement. Quel est votre secret ?
Mes expériences à l’étranger, à Monaco et à Wolfsburg, même si elles furent difficiles, m’ont énormément appris. La foi m’aide aussi beaucoup. Je prie tous les jours et j’écoute souvent des chansons religieuses (NDLR : il était enfant de chœur en Afrique). Je peux aussi me reposer, aujourd’hui, sur une stabilité familiale. Mon épouse est à nouveau enceinte. C’est fantastique après le décès tragique de mon plus jeune fils il y a un an et demi. Anderlecht, avec notamment Jean-François Lenvain de la cellule sociale qui est présent en permanence à mes côtés (NDLR : y compris à la Coupe d’Afrique), fait tout pour moi. Tout le monde m’aime au Sporting, c’est très important. J’ai besoin de chaleur humaine pour bien jouer. Je ne regrette pas mes erreurs de jeunesse, elles font partie de moi, mais elles appartiennent au passé. Mes derniers péchés mignons sont les grosses voitures. Pour le reste, je suis devenu très sérieux. Je ne me suis jamais senti aussi bien dans ma peau.
Votre contrat arrivant à son terme en juin 2014, vous tournerez plus que probablement le dos à Anderlecht l’été prochain. N’avez-vous pas peur de perdre cet état de grâce ?
C’est la vie. Je dois aussi penser à ma carrière. J’ai déjà 27 ans, je n’ai plus de temps à perdre.
Lucas Biglia tenait le même discours avant de rester bloquer en Argentine, sous certificat médical…
Lucas a passé tellement d’années à Anderlecht. Je comprends son envie de vivre autre chose. Personnellement, je reste d’office jusqu’en fin de saison. Je l’ai promis. Mon contrat se termine en juin 2014, et la direction mauve ne tardera pas à discuter avec moi d’une éventuelle prolongation.
Mais j’espère décrocher un gros transfert dans six mois. Même si j’ai aussi des contacts en Italie et si je n’exclus pas la Russie en cas de toute grosse offre, l’Angleterre me fait rêver. Je suis fait pour ce championnat. Je sais que je peux faire aussi bien que Benteke. Ce serait génial de retrouver mon grand ami Cheikhou (Kouyaté) en Premier League la saison prochaine.
J’aime les grands matches. C’est lors des grandes soirées que je montre vraiment ce que je vaux : cette saison, j’ai marqué contre Limassol pour propulser Anderlecht en C1, j’ai aussi signé un but décisif contre le Zenit et j’ai inscrit le but qualificatif pour la CAN avec le Congo. Et, dimanche, j’ai égalisé contre le Ghana…
Avec un but inscrit toutes les 88 minutes jouées, vous êtes le 3e attaquant le plus efficace de la D1, derrière Bacca et Plet. Quel est votre objectif pour la fin de saison ?
Au départ, j’aurais été heureux avec 20 buts. Mais maintenant que je suis à 15, je vise clairement le titre de meilleur buteur. Même si je louperai quelques matches à cause de la CAN, je crois pouvoir rattraper Bacca (17) et Ibou (16), et même les dépasser.
Inscrire un but reste un moment privilégié ?
Plus que jamais! J’en profite plus qu’avant, je me rends compte qu’à 27 ans les années filent, il ne me reste plus énormément de temps au top niveau. Avant un match, je sens généralement quand je vais marquer et je n’hésite pas à l’annoncer à mes équipiers.
Bien davantage que le championnat de Belgique et le Soulier d’or, c’est la Coupe d’Afrique qui vous occupe actuellement…
Je suis occupé à vivre en Afrique du Sud mes plus grosses émotions en tant que footballeur. Provoquer un penalty et le transformer pour décrocher l’égalisation fut un moment extraordinaire. Et être élu homme du match pour mon baptême du feu en Coupe d’Afrique… que demander de plus? Je serai évidemment très heureux et très fier de remporter le Soulier d’or, notamment pour toute la communauté congolaise de Belgique. Je dirai aussi merci à Anderlecht et au Standard qui resteront à jamais dans mon cœur.
J’adore le Sporting qui m’a découvert et fait venir à Bruxelles à 20 ans. Le parc Astrid est ma maison et ma seconde famille. Mais je ne peux oublier ce que j’ai vécu chez les Rouches. Mon fils est né à Liège. Ce Soulier d’or, si je l’obtiens, je ne le fêterai qu’à mon retour de la CAN. Je sais qu’on peut aller au bout avec le Congo. Je rêve de la finale! Comme mon idole Drogba, je voudrais devenir un jour le meilleur footballeur africain. C’est en brillant dans cette Coupe d’Afrique que je pourrai y parvenir. Quand je vois que Drogba n’est arrivé à Chelsea qu’à 28 ans, tout est possible. N’oubliez pas qu’à Mazembe, on m’appelait le Drogba de Lubumbashi…
Le président à la barre ?
D’un phénomène à l’autre, on dira que son entraîneur du Congo Claude Le Roy vient, pour sa part, de le comparer sans rire à... Ibrahimovic ! Ce soir, Dieu devrait être en direct dans l’émission grâce à la video conférence, et il aurait souhaité que, s’il gagne, ce soit le président Roger Vanden Stock qui reçoive le trophée à sa place.